mercredi 27 juin 2012

« ENLEVER LE SANG »


J’ai entendu parler, lorsque j’étais enfant, de l’importance « d’enlever le sang », « hiyyed ddmme », pour éloigner la maladie.
« Hjjme ».[1]
Il s’agissait, d’après ce que j’ai retenu, de retirer du sang de l’organisme, à l’aide de deux sortes d’objets en cuivre, ayant la forme de cornes fines, pas très longues.
La personne chargée d’effectuer ce travail, procédait à des incisions derrière la tête, près de la nuque, et plaçait les objets pour récupérer le sang.[2]
Je pense même avoir assisté à cette opération dans un souq.[3]
C’était sous une tente[4] près de laquelle des ânes ou des mulets, pleins de patience, attendaient tranquillement.
La personne venue pour « enlever le sang » s’asseyait sur une natte à même le sol.
Le « soigneur », accroupi derrière, réalisait son intervention.
Dans les allées du souq, poussiéreuses l’été, boueuses l’hiver, chacun vaquait à ses occupations et la personne qui se faisait « enlever du sang », ne tardait pas à se mêler à la foule.
Au souq, j’appréciais l’espace réservé aux tapis et celui des animaux.
Le temps est passé.
Les années se sont écoulées.
Des saisons ont succédé aux saisons.
Je suis aujourd’hui grand-père par la grâce d’Allaah, installé en France avec mon épouse, nos deux enfants, leurs épouses et nos deux petits-enfants.
Et je viens de lire un livre sur « alhijaama ».[5]
Un travail effectué par un médecin généraliste à Paris,[6] membre de l’International Cupping Therapy Society,[7]administrateur du site web d’information médicale « MuslimSanté ».
En quatrième de couverture, il est précisé que « la préservation de la santé est une obligation morale mais aussi religieuse, en effet, le Prophète[8] a dit : Serviteurs d’Allah,[9] soignez-vous mais ne vous soignez pas avec l’illicite. Il incombe ainsi à tout musulman[10] et musulmane[11] de recourir à tous les moyens licites permettant de préserver sa « bonne santé ».
L’ouvrage se veut une présentation détaillée d’une alternative thérapeutique exemplaire rapportée d’une part dans la tradition prophétique du Prophète Muhammad,[12] corroborée, d’autre part, par la science expérimentale antique et moderne : Al-Hijâma[13] ou Cupping therapy.
La hijama a été décrite dans de nombreux ouvrages, à la fois religieux et scientifiques, mais au fil du temps, un certain nombre d’informations ont été attribuées à tort à la hijama.
Le but de l’ouvrage est donc de proposer une approche plus rigoureuse, sur le plan religieux et scientifique, et plus méthodique.
Il s’agit donc d’un tahqîq,[14] c'est-à-dire d’une réactualisation des connaissances sur cette pratique exemplaire ».[15]
Beaucoup de professionnels de la santé sont opposés aux « alternatives thérapeutiques », aux « médecines complémentaires », aux « médecines douces » et « autres ».
Ils rejettent par conséquent « alhijaama »,[16] comme thérapeutique.
Des médecins se réclamant de l’Islaam la rejettent aussi et ne reconnaissent pas ses bienfaits soulignés dans plusieurs « hadiite »[17] de l’ultime Prophète et Messager[18] sur lui la bénédiction et la paix.
La « hijama » est une technique thérapeutique pratiquée un peu partout, depuis très longtemps.
Elle a suscité et continue de susciter l’intérêt auprès des professionnels de la santé.
« La cupping therapy (Al-Hijâma) est une très ancienne technique naturelle de soin, pratiquée par toutes les principales civilisations, comme la civilisation égyptienne et la civilisation chinoise. La hijama ou cupping  était aussi pratiquée dans le reste du monde, c’est ainsi qu’Hippocrate, père de la médecine occidentale, pratiquait la hijama et en recommandait l’usage pour un certain nombre de maladies. […]
La hijama, dans la théorie de la médecine chinoise, stimulerait les flux d’énergie appelés Qi, mais elle stimule aussi la circulation sanguine, réduit la douleur, augmente l’immunité, élimine les substances intervenant dans les processus inflammatoires, régule le taux d’hormones. Elle stimule également la libération de monoxyde d’azote aux multiples intérêts, tel que son interaction avec la circulation générale et le soulagement des douleurs ».[19]
L’auteur précise que « le terme hajm désigne une succion », que « ce même terme était utilisé pour définir la succion du mamelon par le nourrisson » et que « la hijama correspond ainsi à une thérapeutique faisant intervenir un système de succion ».[20]
« L’utilisation des ventouses traditionnelles avec le principe de combustion est une technique très ancienne. En effet, c’est cette forme de succion qui fût décrite sur le papyrus d’Ebers (Curtis, 2005) […].
Cependant, d’autres variantes de cette technique sont apparues avec l’usage de tronçon de bambou en Asie et des cornes d’animaux en Afrique. Dans ce dernier cas, les cornes étaient perforées à leur extrémité et c’est par la force des poumons que la succion était réalisée ».[21]
Les différents modèles de ventouses jusqu’à nos jours sont décrits, avec les avantages et les inconvénients relatifs à leurs utilisations.
Les diverses sortes de « hijama » sont exposées, ainsi que les mécanismes de succion et les manières de procéder, avec les précautions à prendre, dans la pratique de cette technique.
L’auteur traite ensuite des bases et des théories scientifiques de la « hijama » et détaille l’action épurative et régulatrice, l’action stimulatrice sur le système immunitaire, l’action analgésique, l’action neurologique et neuro-végétative et l’action hormonale.
Des situations cliniques et des pathologies traitées, illustrent l’intérêt de la « hijama ».
En conclusion, l’auteur souligne l’importance du respect des règles en vigueur dans les divers pays, avant d’envisager le recours à la pratique de la « hijama », et cite‘Amr[22] Ibn Chou’ayb,[23] selon lequel l’ultime Prophète et Messager sur lui la bénédiction et la paix a dit :
« Quiconque s’adonne à la médecine sans en connaître les enseignements, assumera l’entière responsabilité des conséquences fâcheuses de ses actes ».[24]



BOUAZZA


[1] Terme de l’arabe parlé (ddarijaa) au Mghrib (Maroc) qui vient de hijaama (hijama), mot traduit par saignée et qui est lié à hjjaame, c'est-à-dire celui qui pratique la saignée″.
Le mot signifie aussi coiffeur, barbier qui rasait aussi complètement la tête.
[2] Retirer du mauvais sang m’avait-on expliqué, pouvait aider la personne malade à retrouver la santé.
Il fallait même, par prévention, enlever le sang à intervalles réguliers.
[3] Souk, marché rural qui sert à l’échange de marchandises et où les ruraux cherchent à se faire soigner par des personnes désignées comme ayant des compétences dans le domaine de la santé.
[4] Lkhima, alkhayma.
[5] La saignée.
[6] Docteur Aït M’hammed Moloud, La Hijama, Fondements, Techniques, Conseils, Paris, Éditions Tawba, 2012
[7] ICTS.
[8] Sallaa Allaah ‘alayhi wa sallame, sur lui la bénédiction et la paix.
[9] Allaah.
[10] Moslime.
[11] Moslima.
[12] Mohammad, l’ultime Prophète et Messager sur lui la bénédiction et la paix.
[13] Alhijaama.
[14] Tahqiiq.
[15] C’est une pratique qui concerne tout le corps et pas seulement la tête comme il en ressort dans mes souvenirs d’enfance.
[16] La hijama.
[17] Lorsqu’on parle de hadiite (hadite, hadiithe, hadith), cela renvoie à ce qui a été rapporté concernant la conduite de Mohammad, l’ultime Prophète et Messager sur lui la bénédiction et la paix.
Alqoraane (Le Coran) est la continuation, la synthèse et le parachèvement du Message d’Allaah.
Mohammad, l’ultime Prophète et Messager sur lui la bénédiction et la paix, a eu pour Mission de le transmettre.
Assonna a trait à la conduite de Mohammad sur lui la bénédiction et la paix.
Alqoraane n’a de sens qu’avec Assonna et Assonna ne peut exister sans Alqoraane.
Assonna procède d’Alqoraane.
[18] Un Prophète (Nabiyy), sur lui la bénédiction et la paix, est quelqu’un qui a reçu d’Allaah la mission de rappeler ce qui a été précisé auparavant dans le Message d’Allaah.
Un Messager (Raçoul), qui est aussi Prophète sur lui la bénédiction et la paix, est quelqu’un qui a reçu d’Allaah la mission de rappeler ce qui a été précisé auparavant dans le Message d’Allaah, et de transmettre une législation nouvelle, dans la continuité du Message d’Allaah qui est UN.
C’est le Message de l’Islaam qui, depuis Aadame (Adam) jusqu’à Mohammad sur eux la bénédiction et la paix, invite à faire du mieux possible pour Adorer Allaah, comme Allaah le demande.
Dans un hadiite, Mohammad l’ultime Prophète et Messager sur lui la bénédiction et la paix, indique que le nombre total des Prophètes sur eux la bénédiction et la paix est de cent vingt quatre mille, et celui des Messagers sur eux la bénédiction et la paix est de trois cents quinze.
(Hadiite rapporté par Ahmad qu’Allaah le bénisse).
[19] Préface du docteur Tamer Shaban, p.5.
[20] Docteur Aït M’hammed Moloud, La Hijama, Fondements, Techniques, Conseils, Paris, Éditions Tawba, 2012, p. 17.
[21] Docteur Aït M’hammed Moloud, op. Cit., p.37-43.
[22] Le rroulé.
[23] Radia Allaah ‘anho (lerroulé), qu’Allaah le bénisse.

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