C’était comme s’il avait senti à
travers l’écran de télévision, que je devinais ce qu’il allait me raconter.
Il était de la périphérie de
Naples.
L’Italie.
Magnifique plantation de citrons
d’Amalfi.
Souvenirs.
Autrefois, la famille vivait dans
une seule pièce.
Pour s’accoupler, les parents la quittaient
en pleine nuit, et allaient dans la plantation de citrons.
C’est au milieu des citronniers
que sa mère a accueilli les semences de son père où se trouvaient les enfants.
Ses frères, ses sœurs et lui.
En eux coule le citron, avait-il
dit.[1]
Flots de pensées.
Averses d’images.
Afflux de sensations.
Me voilà enfant.
Appréciant les promenades avec un frère cadet et une soeur
plus âgée.
Douceur d’automne.
Nuages d’hiver.
Ciel bleu du printemps.
Chaleur du soleil l’été.
La maison avait un patio où j’aimais
jouer et auquel je repense avec douceur.
Ma belle-mère, mes sœurs, mes
frères et moi occupions le rez-de-chaussée.
Mon père avait le premier étage
où son épouse le rejoignait la nuit.
Pour y accéder, le père passait
cependant par le rez-de-chaussée et y restait un peu parfois.
Il
fallait emprunter les allées du territoire du père pour monter à la
terrasse.
Cette terrasse était un lieu
enchanteur.
Et c’est à cet endroit que j’ai
eu des sensations qu’il m’est difficile aujourd’hui encore, de décrire avec des
mots.
Un jour, j’y suis resté un long
moment.
Il faisait beau.
La terrasse voisine était
couverte d’une toile qui la transformait en une sorte de grande tente. C’était
la fête.
J’écoutais.
Je pouvais regarder aussi et ne
me privais pas de le faire.
Je ne sais pas comment les choses
se sont passées, mais subitement, elle était devant moi.
Au milieu des chants et d’innombrables
personnes.
Je ne regardais qu’elle.
Je n’avais jamais vu quelqu’un
comme elle.
J’étais transporté.
Elle était radieuse.
C’était une femme, mais pour moi
c’était « autre chose ».
Je ne savais pas quoi.
Je pensais qu’elle ne regardait
que moi et j’avais la sensation qu’elle me caressait du regard, me transmettait
l’affection, m’offrait l’amour.
Une coulée de bonheur.
Ma belle-mère m’a expliqué que
j’avais vu la mariée.
La signification exacte m’échappait
un peu et j’avais une forte envie de rejoindre cette femme et de rester avec
elle.
C’est peut-être à partir de cette
époque que le mariage est devenu pour moi un symbole fort que les mots peinent
à décrire.
Je me suis marié depuis.
Qu’est devenue la femme de la terrasse ?
Les années ont succédé aux années.
Des feuilles descendent des
arbres et étreignent le sol.
Étalage de couleurs.
Une frêle toile d’araignée.
Une abeille poursuit son
exploration.
Deux lapins regardent au loin.
Le bruit des véhicules à proximité ne couvre pas le son des
glorifications que répand un couple d’oiseaux.
Un rythme m’accompagne.
Le rythme des battements du coeur de la mère.
Que dire de ce qui a été ?
Je sais, de Source Sûre, d’où je
viens et où je vais.
Il pleut.
Il pleut et je pleure.
Je pleure et je pense aux larmes qui font germer des
semences.
Saisir le Sens.
Approfondir le Lien.[4]
BOUAZZA
[1] ″Échappées belles″, émission de télévision (France 5),
dimanche 20 avril 2012 selon le calendrier dit grégorien.
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