jeudi 29 novembre 2012

ENCORE SUR L’ÉVASION



Je ne suis pas dans « la justification » à posteriori, en disant que j’ai quitté le Maroc pour fuir l’atmosphère avilissante entretenue et répandue par un régime corrompu, fondé sur le crime, et maintenu par l’impérialo-sionisme.
À l’époque où j’ai décidé de partir, je ne m’exprimais pas ainsi, mais je ne le sentais peut-être pas autrement.
J’ai quitté le Maroc pour ramener mon épouse au pays qu’elle a quitté afin de m’accompagner, pour protéger nos enfants et, je le dis en mots que je n’étais pas en mesure d’utiliser à l’époque, « pour ne pas me faire vider de ce qui me remplit avant même que je ne sois de ce monde ».
J’ai quitté le Maroc une première fois, après le baccalauréat, pour des études universitaires en France où je suis resté de 1970 à 1977.[1]
J’y suis retourné et au bout de quatre ans, je l’ai quitté avec mon épouse et nos deux fils pour nous installer en France où nous sommes encore, par la grâce du Seigneur des univers.[2]
À un moment, en attendant de partir, car dans mon esprit le projet d’évasion prenait forme, j’ai mis un terme à mon travail dans l’administration pour faire le barreau, et entrepris donc un stage d’avocat.
Un an plus tard, en 1981, j’ai demandé à mon épouse de se préparer pour retourner en France.
Et avant la fin de l’année scolaire, j’ai informé mon père, ma mère, quelques autres membres de la famille, et des amis, du projet d’évasion
Au début de l’été, mon épouse a quitté le Maroc avec nos deux fils.
Moi je l’ai fait plus d’un mois après.
Je suis parti un matin.
En plein été.
En pleine lumière.
Quelques semaines seulement venaient de s’écouler depuis des événements sanglants[3] à ddaar lbidaa[4] et dans d’autres villes :
Les hommes, les femmes, les enfants en marche.
L’arsenal du maintien de l’ordre.
La panoplie répressive.
Les milliers d’arrestations.
Les camps de détention et de torture.
Les blessés et les tués.
Les procès en vertu de la loi colonialiste[5]sur les manifestations contraires à l’ordre et réprimant les atteintes au respect dû à l’autorité.
Dans le taxi qui m’emmenait à l’aéroport, j’avais hâte d’être et dans l’avion.[6]
Trente et un ans après, je suis reconnaissant à Allaah d’avoir permis cette évasion.[7]



BOUAZZA


[1] Selon le calendrier dit grégorien.
[2] Rabb al’aalamiine (le r roulé).
Mon épouse a eu un poste dans l’enseignement d’où elle était en détachement.
Moi j’ai mis presque trois ans pour décrocher un emploi stable.
Je savais ce qui m’attendait, et mon évasion n’avait pas pour but que je fasse carrière en France.
[3] Événements du mois de juin 1981.
[4] Addaar albaydaa-e (le r roulé), la maison blanche, Casablanca.
[5] Loi du 29 juin 1935, mise en place par la France colonialiste au Maroc colonisé, et appliqué par le régime de l’indépendance dans l’interdépendance contre les indigènes.
Régime jouissant du statut octroyé par le colonialisme, l’impérialo-sionisme, statut qui s’est traduit dans les colonies par la multiplication des "États" supplétifs, subordonnés avec plus ou moins de zèle, de soumission et de servilité dans l’exécution des ordres des métropoles et autres employeurs.
Ces "États", dont ceux dits musulmans, sont fondés sur l’imposture, le crime, la trahison, la tromperie, la corruption, l’injustice, la perversion, la débauche, le mensonge, le pillage, l’oppression, l’exploitation, le viol, la tyrannie, la torture, l’enfermement, la négation de l’être humain.
[6] Je ne fais que répéter ce que j’ai déjà exposé.

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