Depuis longtemps, chaque fois que
je vais en Italie, ou que j’entends parler italien, j’ai une sorte de regret de
ne pas maîtriser cette langue.
Il y a des années, j’ai essayé de
l’apprendre en suivant des cours au centre culturel.
Je me suis alors rendu compte que
ce n’est pas une langue aussi facile que je le croyais.
J’ai abandonné cet apprentissage
au bout du dixième cours qui concluait un cycle payé d’avance.
Mon épouse a fait des études
supérieures d’italien et en possède une maîtrise.
Elle parle couramment cette
langue qu’elle a enseignée pendant une année, au début de sa carrière
d’enseignante.
Son père était originaire
d’Italie.
Né en 1903[1] en
Italie du nord, il était arrivé en France à l’âge de 16 ans.
Pour travailler.
Ses parents étaient des paysans
pauvres.
Il faisait partie d’une fratrie
de six enfants : trois filles et trois garçons.
Il était l’aîné.
En 1931, il avait épousé une
femme née en 1904,[2]dont les parents tenaient
une boulangerie-épicerie au lieu-dit l’Homme-d’Armes, commune de Savasse, dans
la Drôme.
Elle faisait partie d’une fratrie
de cinq enfants : quatre garçons et elle même.
Son époux avait toujours
travaillé dans le bâtiment.
Jusqu’à sa retraite à l’âge de 65
ans.
En Allemagne, lorsqu’il avait été
déporté dans le cadre de ce qui avait était appelé le travail obligatoire, il
était employé dans une ferme.
Quelques années après son retour
dans la Drôme où il avait retrouvé son épouse, ils avaient eu un enfant alors
qu’ils n’y croyaient plus.
Ils n’en ont pas eu d’autre.
Je l’ai toujours connu discret et
simple.
C’était un homme qui ne trichait
pas.
Lorsque je me préparais en 1977 à
quitter la France pour le Maroc avec sa fille et son petit-fils, la séparation
lui était dure, mais il n’était pas triste.[5]
Il m’avait fait comprendre qu’il
savait qu’avec moi, ils étaient dans de bonnes mains.
Et avec sa profonde réserve, il
m’avait signifié qu’il était rassuré de me passer le relais afin que je prenne
soin de sa fille.[6]
Lorsque j’entends des personnes
s’exprimer en cette langue, j’ai l’agréable sensation que cette langue me parle.
Le cadet de mes deux fils n’a pas
eu de mal à parler l’italien.
Comment a-t-il fait pour
l’apprendre ?
Comment fait-il pour préparer les
pâtes comme en Italie ?
Mon fils aîné se rend aussi en Italie,
il est également doué pour faire des pâtes, et se débrouille en italien.
Un de mes neveux, l’aîné de ma
sœur décédée en 1970, a quitté le Maroc dans les années quatre-vingts, pour
s’installer en Italie où il a vécu jusqu’en 2012.
Il parle couramment l’italien bien sûr, mais qu’est-ce qu’il
sent en parlant cette langue ?
J’ai une pensée, encore une fois,[7] pour
Haçane Ibn Alwazzaane, capturé par des pirates au XVIème siècle,
donné au Pape et devenu géographe.
Le géographe Jean Léon de
Médicis, dit Léon l’Africain :
« […] Après avoir vécu à Grenade,
sa ville natale, à Fès, à Tombouctou, au Caire, à Constantinople, Léon passe
plusieurs années à Rome, où il enseigne l’arabe, écrit la partie hébraïque d’un
dictionnaire polyglotte, et rédige en italien, sa célèbre « description de
l’Afrique », qui va rester pendant quatre siècles une référence
essentielle […].
Homme d’Orient et d’Occident
[…] ».[8]
BOUAZZA
[1] Selon le calendrier dit
grégorien.
[2] Décédée en juin 1979.
[3] Née en juillet 1948.
[4] Moi je suis né en mars
1950.
[5] Je suis arrivé en France
pour des études supérieures en 1970.
En retournant au Maroc en 1977, j’étais marié et père
d’un fils.
Pendant les quatre années passées au Maroc, nous avons
eu un deuxième fils.
Nous sommes revenus en 1981 pour nous installer de
nouveau en France où nous sommes encore.
Nos fils sont époux et
pères, et nous sommes, par la miséricorde d’Allaah, mon épouse et moi, Grands-parents
depuis 2012.
[6] Il est mort en 1981,
l’année de notre retour du Maroc, pour
nous installer en France.
[7] J’en ai parlé déjà.
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